Le français s’affiche : les nouveautés de février

En ce mois de février 2019, six nouveaux participants, dont l’auteur et rappeur Biz, témoignent de leur amour pour le français dans le cadre de la campagne de valorisation du cégep Édouard-Montpetit Le français s’affiche.

L’auteur-compositeur-interprète David Portelance, le scénariste et humoriste Daniel Savoie, mieux connu pour son personnage de Patrice Lemieux, les coordonnateurs de l’initiative « Le français, une valeur qui compte » de HEC Montréal, David Prince et Valérie Patenaude, et l’une des grandes voix du Québec, Marie Denise Pelletier, nous font aussi part du rapport qu’ils entretiennent avec cette langue.

Cliquez ici pour lire leurs entrevues et découvrir nos capsules sur le français!

Franchement

Francoeur est la dixième œuvre publiée par Mathieu Blais, écrivain et professeur au Département de littérature. C’est le récit d’un écorché vif de la vie qui illumine le quotidien de ses codétenus, en particulier Bronco, compagnon de déroute de Francoeur et narrateur de cette palpitante histoire de violence, de dépossession et d’amour. Nous avons rencontré notre collègue à l’occasion de cette parution.

Le blogue : Où situer Francoeur dans l’ensemble de ton œuvre ?

Mathieu Blais : En pleine continuité avec ce qui a précédé. Ce qui m’intéresse, ce sont les opprimés, la marge. J’ai débuté ma « carrière » comme poète, dans la marge de la marge si l’on veut, et j’ai toujours cherché à investir les figures de la marginalité et de la pauvreté, les maganés de la vie. Francoeur est le deuxième de trois livres sur la violence. Sainte-Famille traitait de violence conjugale, Francoeur traite de violence amoureuse, le dernier traitera de violence révolutionnaire. Le mot révolutionnaire fait défaut aujourd’hui au Québec, n’est pas véritablement investi. J’explore toujours le tumulte intérieur des colonisés. Du black bloc à la femme victime de violence conjugale, la violence renvoie à notre aliénation. Encore aujourd’hui nous restons profondément colonisés, mais ancré dans la question des classes sociales, en littérature en tout cas, cet état est porteur sur le plan narratif.

Le blogue : Vois-tu un lien entre ton travail de romancier et ce que des critiques ont appelé la littérature de la chainsaw ?

M.B. : Peut-être dans le réinvestissement de la figure du territoire, de sa langue, mais je n’écris pas en fonction d’une soi-disant école, non.  De manière générale, quelque chose se libère progressivement en moi et je me retrouve comme conteur de plus en plus. Si on veut chercher un intertexte à Francoeur ce serait Novecento : une même manière de parler, le recours au huis clos, l’imagination d’un ailleurs, mais le réalisme magique en moins. Comme pour le personnage éponyme du livre de Baricco, c’est aussi l’idée d’une bonne histoire à raconter. Le point de départ de Francoeur, c’est un fait divers : il y a dix ans un camion était lancé dans le bunker des Hells à Sorel et prenait feu.

Le blogue : Quel rôle joue la violence ?

M.B. : Dans certains cas, la violence est souvent nécessaire pour briser le cycle de la répétition et de l’aliénation (Fanon) et de la violence infligée à soi-même et à ses frères (c’est le cas de Francoeur). Depuis les années 1940 on assiste à une fragmentation des luttes identitaires, par ailleurs absolument nécessaire, mais qui dissout tout projet national. On parle beaucoup d’intersectionnalité mais quel en est le point focal ?  Est-ce porteur d’un projet de société ?  Je suis un anticapitaliste primaire (rires). La violence dans nos sociétés est désormais balisée par la classe moyenne qui est une sorte de fausse classe – ni pauvre ni riche, ni tout à fait locataire ou propriétaire. Toujours est-il que mon rapport au social, et à la violence en particulier, s’exprime par des figures de pauvreté et de criminalité et Francoeur est une histoire de survivance. Bronco et Francoeur sont pris dans un système qui les broie, ils vont s’utiliser l’un l’autre, c’est leur réciprocité qui donne un sens à l’histoire. Les jeux d’alliance et d’amitié ne font qu’un temps dans un contexte d’exploitation.

Le blogue : Quel est ton rapport au travail d’écriture ?

M.B. : J’ai eu la chance extraordinaire de bénéficier d’une résidence d’écriture à l’été 2017 à la Bibliothèque Raymond-Lévesque où j’ai été confiné à un bureau avec un horaire serré pendant quelques mois. Un écrivain dans une cage de verre ! (rires) Et j’ai adoré cela car je suis très discipliné. Je dois avoir un fasciste intérieur (rires). En temps normal, il m’est relativement difficile de réserver du temps à l’écriture compte tenu de ma vie familiale et de mon travail de prof. La résidence m’a fait un bien fou.

Le blogue : As-tu écrit Francoeur rapidement ?

M.B. : Oui, pratiquement d’un seul jet. La première version fut écrite de manière farouchement spontanée. Dans Sainte-Famille, je m’étais intéressé au flux de conscience des trois personnages, et cela a ouvert quelque chose dans ma pratique d’écriture. Francoeur a été comme un robinet ouvert qui n’arrêtait plus de couler. À la limite, j’aurais publié Francoeur comme je l’ai d’abord écrit, soit sans ponctuation, mais on m’en a dissuadé (rires). Il y a quand même l’exigence du narratif, d’un certain public lecteur, même minimal.

Le blogue : Vises-tu un plus grand public, davantage de reconnaissance ? La littérature peut-elle encore changer le monde ?

M.B. : Ce sont deux questions différentes. À la base je ne suis pas quelqu’un de « public ». Ça m’a pris un doctorat pour me rendre compte que l’université n’était pas faite pour moi, ça m’a pris dix livres pour me rendre compte que l’écrivain « public » ce n’est pas vraiment moi non plus. Ce qui n’enlève rien à l’importance d’élaborer des représentations du monde qui influenceront le lectorat. C’est la même chose pour le professeur que je suis. J’espère agir comme révélateur mais les étudiants ont du chemin à faire et je ne sais pas si l’institution collégiale peut à elle seule faire d’eux des lecteurs. Mes espoirs sont-ils moins élevés qu’au début de ma carrière ? Peut-être mais on cherche toujours son cachalot blanc, et flamber les consciences reste encore mon objectif. Je suis plus anarchiste qu’indépendantiste finalement (rires).

Le blogue : Es-tu un lecteur de littérature policière ou criminelle ?

M.B. : La littérature de genre ne m’a pas tant nourri mais j’aime un certain type de romans noirs. Je crois que je vais de plus en plus dans cette direction. J’aime ce que la littérature révèle du social dans ce qu’il peut avoir de sordide. La littérature de genre qui a des qualités littéraires, qui fait parler le social et qui est un plaisir de lecture aussi, pourquoi pas ! Je lis actuellement du Tony Hillerman, qui donne dans l’ethnopolar. Je suis surtout un grand lecteur d’Edward Abbey, Charles Bukowski, Tony Morrison. Le méridien de sang de Cormac McCarthy, par exemple, est un roman de fou – toute son œuvre est à lire, de toute façon. Avons-nous cela au Québec ? Avec le temps, comme plusieurs, je retourne à une certaine américanité. Que ce soit Mistral, Hamelin, Archibald, Grenier ou la dite littérature de la chainsaw, nous sommes très américains dans la façon que nous avons de parler de la nature, de nous raconter. Mais, pour parler plus strictement de mon maître à penser, je cherche encore le Thoreau québécois (rires).

(propos recueillis par Robert Saletti)

Pascale Millot et Réjean Ducharme

DucharmeEn avril 2000, Pascale Millot avait publié un long reportage sur le mythe Réjean Ducharme pour le magazine L’actualité. Suite à la mort de celui-ci, elle a été interviewée par Catherine Perrin de l’émission Medium large à Ici Première et au 98.5 par Marie-Claude Lavalée.

Pour écouter les entrevues : Ici Première, 98.5.

Mathieu Blais à Plus on est de fous plus on lit

Sainte-FamilleMathieu Blais participait à l’émission littéraire Plus on est de fous plus on lit, à Ici Première, le mercredi 30 août. Il était interviewé par Mathieu Dugal à propos de son tout nouveau roman, (Sainte-Famille), paru récemment chez Leméac et dont on vous reparlera très bientôt.

Pour écouter l’entrevue, c’est ici.

« Le Français s’affiche » se bonifie

Julien_PoulinLe Centre de valorisation et d’amélioration du français écrit vient de faire une substantielle mise à jour de son site internet. Entre autres chroniques et textes divers sur le français s’ajoute une entrevue avec Julien Poulien, Elvis Gratton en personne, qui nous parle de son rapport à la langue, lequel lui permet d’évoquer la figure tutélaire de son ami Pierre Falardeau. Dans un registre plus lyrique, le poète Claude Péloquin nous offre un inédit, « La langue du poète », où il met à nu son rapport avec les mots. Des capsules vidéos viennent également s’ajouter, parmi lesquelles Lorraine Pintal, directrice artistique du Théâtre du Nouveau Monde, nous explique combien la question du français est centrale dans la culture d’ici.

 « Le français s’affiche » est en perpétuelle construction et se verra enrichi tout au long du semestre de contenu diversifié allant de jeux linguistiques mettant en vedette notre collègue Robert Lévêque ainsi que des suggestions de lecture de notre ancienne collègue désormais Directrice adjointe des études, Rachel Belzile, et d’Olivier Pelletier, professeur d’anglais au Département des langues du collège.

Soyez patients, la page internet est un peu longue à charger, mais l’attente est mille fois récompensée par l’ineffable bonheur de voir s’afficher le français sous toutes ses formes.

Simon Roy en entrevue

Owen Hopkins Esquire_pDeux ans après Ma vie rouge Kubrick, l’écrivain et professeur de littérature au Cégep Lionel-Groulx Simon Roy publie un second roman, toujours aux éditions du Boréal, intitulé Owen Hopkins, esquire. Pascale Millot l’a interviewé pour le magazine Montréal centre-ville. À lire ici.

Simon Roy sera de passage à Édouard-Montpetit en novembre pour parler de son premier roman, Ma vie rouge Kubrick, et des rapports entre fiction et réalité, mensonge et récit, écriture de soi et réécriture de soi, etc.

Une écriture organique

France Mongeau« Quel artiste ne voudrait s’établir là, où le centre organique de tout mouvement dans l’espace et le temps — qu’il s’appelle cerveau, ou coeur de la Création — détermine toutes les fonctions ? » Klee

 

Si vous avez lu le dernier recueil de France Mongeau, Les heures réversibles, paru aux Éditions du Noroît en 2015, peut-être aurez-vous remarqué la dédicace : « À Clara Thomassen ». C’est une sorte d’alter ego de l’auteure : « Clara Thomassen n’existe pas. C’est un personnage qui tournoie dans ma tête, traverse mes rêves et me tient depuis toujours. »

Si nous faisons tous notre entrée dans le monde accompagnés d’un double, comme le relate Platon dans le mythe d’Er à la fin de La République, certains d’entre nous réussissent extraordinairement bien leur vocation et arrivent à explorer le mystère fondamental de la double naissance.

Le site de France Mongeau a démarré à l’automne 2015. Le projet propose de nous faire entrer dans son atelier de création pour apprécier les rouages de son œuvre poétique et voir comment « toute cette mécanique s’incarne ». C’est comme entrer dans un laboratoire qui s’efforcerait d’illustrer le processus créateur, celui de la fabrication du personnage de Clara, en montrant les ramifications qui président toutes, chacune à leur façon, à sa composition.

Le site se déploie à la manière d’un espace gigogne et invite à la découverte, à la lecture de nombreux textes, tous déjà parus dans des revues d’ici et d’ailleurs, hormis deux inédits — pour un roman en préparation ? D’autres personnages accompagnent Clara : Tom, Vladimir, Christopher et Nouhad. L’exploration nous invite aussi à découvrir les lieux familiers de l’univers poétique de France Mongeau, le nord, la route, la mer et la plaine, pour y entendre des poèmes lus par l’auteure elle-même, regarder un vidéo-poème ou encore, tourner les pages d’un livre d’artiste.

Tout cela s’anime sous nos yeux et prend la forme d’emboitements, d’enchâssements permettant de relier les textes entre eux, comme autant de fragments d’une seule et même oeuvre : les couches successives d’un lent travail d’élaboration. On y goute tantôt la prose, tantôt le vers. Puis, le regard est attiré par un mot, « cheveux », par exemple, qui nous conduit au poème « La chevelure », puis un autre, « brûler », qui nous mène, cette fois, au récit poétique « Le feu, la cendre ».

Clara Thomassen semble être par vocation un personnage en fabrication, elle reste « orpheline de récit », mais sa présence veille, sourd et circule partout, inspirant l’auteure, comme ce visage de la Madone, venu confirmer une intuition : « nous possédons une tristesse immémoriale, et collective ; une mélancolie qui nous dépasse, ancrée dans la race humaine et dans le monde autour de nous. Profonde, sacrée, une tristesse sans possibilité de langage ; celle des arbres gelés dans l’hiver, partagée par l’intelligence de la terre et les êtres sans parole. La beauté de la Vierge me rapprochait étrangement de la mort, la frôlait de près, moi qui n’y connais rien. Je sais maintenant que la beauté et la mort sont de proches parentes. » Cette sculpture fascinante que l’auteure a d’abord aperçue dans une revue annonçant sa restauration en cours, elle ira l’admirer à Toulouse où elle est exposée dans l’actuel Musée des Augustins. L’œuvre anonyme, intitulée Vierge à l’Enfant : Nostre-Dame-de-Grasse (1451-1500), est aussi l’histoire d’une réfection, racontée dans le catalogue Polychromies secrètes, que l’auteure a fait venir en juillet 2013 et qui lui a permis, dès lors, de révéler, de peaufiner, dans Exercice autobiographique no 5 (un des nombreux textes à lire sur le site), certains enjeux qui se logent au coeur même de sa réflexion sur l’Art et de sa pratique de l’écriture.

Un tel jeu de miroirs permet de se livrer au vertige de l’infini, pour le plus grand plaisir des internautes !

Le site en lui-même est une réussite esthétique et conceptuelle. On doit sa réalisation à Jacques Rollin.

Nathalie Ethier

Notre collègue Pascale Millot s’entretient avec Gilles Archambault

Doux démentDans le tout récent numéro du magazine Montréal centre_ville, qui propose des portraits de Montréalais inspirants, notre collègue Pascale Millot réalise une entrevue avec l’écrivain Gilles Archambault dont le dernier roman Doux dément est paru chez Boréal en octobre 2015.

Le « repfran » sort de l’ombre

Depuis janvier 2014, notre collègue Jean-Sébastien Ménard occupe la fonction de « repfran » (Répondant du dossier de la valorisation du français) au cégep Édouard-Montpetit. C’est dans le cadre de ce délicat mandat qu’il a mis sur pied la plateforme internet Centre de valorisation et d’amélioration du français qui est lancée aujourd’hui. Entrevue.

À quels objectifs et besoins répond cette plateforme ?

En juin 2014, le Cégep a adopté une nouvelle Politique Institutionnelle de la langue française (la fameuse PILF !) et entrepris une série d’actions afin de valoriser le français. Parmi celles-ci, notons la mise sur pied d’un projet-pilote afin d’accompagner les étudiants et les étudiantes allophones dans l’apprentissage du français, la révision du test de français à l’embauche ainsi que la révision de l’article de la Politique institutionnelle de l’évaluation des apprentissages (PIEA) portant sur l’évaluation du français.

Le message que le Cégep veut ainsi envoyer est celui que le français est important en tout temps, dans toutes les disciplines et pour tout le monde. En ce sens, il encourage les étudiantes et les étudiants ainsi que les membres du personnel à améliorer leurs compétences langagières tout en comprenant la richesse, la vitalité et l’importance du français.

C’est dans cette optique que le Cégep a décidé « d’afficher son français » et de développer le Centre de valorisation et d’amélioration du français. Cet espace se situe dans le prolongement de la mission éducative des Centres d’aide en français du cégep qui existent depuis 1986. Cette année-là, la professeure Colette Buguet-Melançon et le professeur Daniel Lanthier ont fondé le premier CAF du Québec, au cégep Édouard-Montpetit, afin d’offrir de l’aide et de l’accompagnement aux étudiants soucieux d’améliorer leur français écrit.

Que va-t-on trouver sur cette plateforme ?

Sous la rubrique « amélioration », vous trouverez des liens vers des sites où sont proposés des exercices permettant de réviser les règles de grammaire et de mieux comprendre le fonctionnement de la langue et de la grammaire françaises. Vous trouverez également des liens vers des sites d’établissements scolaires et d’organismes, dont l’Office québécois de la langue française, pour lesquels la langue est au cœur d’une réflexion quotidienne.

Sous la rubrique « valorisation », vous trouverez entre autres des chroniques linguistiques, des capsules vidéo soulignant l’importance de la langue dans divers domaines et d’autres vous permettant de découvrir d’une manière ludique des expressions propres à une discipline d’enseignement. Plus tard, nous espérons pouvoir y ajouter un coin des lecteurs où des étudiantes et des étudiants ainsi que des membres du personnel seront invités à partager leurs lectures coups de cœur.

Comment avez-vous travaillé pour bâtir cette plateforme ?

Sa mise sur pied a été un travail de collaboration. Tout ce qui se trouve dans le volet « Amélioration » provient d’un travail d’équipe entre le personnel des CAF de Longueuil et de l’ÉNA, la Direction des études, le SDIR et le CSA. Pour ce qui est du volet « valorisation », 17 départements du cégep ainsi que le Service de la mobilité étudiante et enseignante ont participé à l’aventure. Enfin, trois stagiaires du programme de Techniques d’intégration multimédia (Loïc Thompson, Peter Tam et Dominique B. Gendron) ainsi que la DISTI ont collaboré à la production des capsules vidéo et aux animations. La Direction des communications a également été active à toutes les étapes du projet. Nous avons aussi pu compter sur la participation de plusieurs organismes et personnalités pour qui le français est important. Parmi eux, notons l’Office québécois de la langue française, l’ancien premier ministre du Québec, Bernard Landry, un assembleur de l’entreprise de télécommunications MDA Corporation, Michel Mercier, et Mario F. Paquet, journaliste et animateur à la radio de Radio-Canada.

Jean-Sébastien Ménard

Jean-Sébastien Ménard est professeur au Département de littérature et de français depuis 2012. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont Une certaine Amérique à lire ; La Beat Generation et la littérature québécoise (Nota Bene, 2014) pour lequel il a été finaliste au prix Gabrielle-Roy et au prix Victor-Barbeau.

Le Centre de valorisation et d’amélioration du français est accessible sous l’onglet « Centres de référence », à cegepmontpetit.ca. Tout le monde est invité à visiter fréquemment ce nouvel espace virtuel afin de découvrir les nouveautés qui seront régulièrement mises en ligne.

 

 

Le projet Diogène : rencontre avec Mathieu Blais

Si tu ne viens pas au cégep, le cégep ira à toi ! C’est la devise qui pourrait caractériser le projet Diogène (ou « Édouard prend la rue ») que notre collègue Mathieu Blais est en train de mettre sur pied.

Jean-Léon_Gérôme - Diogène

Jean-Léon Gérôme, Diogène, 1860.

Qu’est-ce que le projet Diogène ?

Il consiste à développer une offre de cours multidisciplinaire de niveau collégial s’inspirant de l’éducation populaire. L’idée est de mettre sur pied un centre d’éducation populaire mixte (institutionnel et communautaire) au sein même du cégep. Certains cours seraient crédités et auraient notamment pour objectif de lutter contre la pauvreté et l’exclusion en favorisant la persévérance scolaire au niveau collégial. Ces cours miseraient sur une pédagogie alternative, pourraient aborder des enjeux féministes, sociaux et citoyens, etc. Certains autres cours complémentaires ne seraient pas crédités mais auraient pour but l’échange et la diffusion des connaissances en partenariat avec différents groupes communautaires de l’agglomération.

L’idée est de faire en sorte que des jeunes qui ont des parcours scolaires atypiques et qui seraient susceptibles de décrocher dès les premières sessions ne le fassent pas.

Qu’est-ce que l’éducation populaire ?

C’est une éducation où les participants définissent ce qu’ils veulent apprendre, une éducation axée sur le citoyen, sur ses besoins et sa réalité. Le défi est de répondre aux exigences de l’institution scolaire tout en tenant compte des étudiants. Je crois vraiment que si on outille correctement 15 étudiants au parcours scolaire atypique au sein d’un petit groupe, ils seront à même de réussir, alors qu’ils ne le pourraient pas dans un groupe de 40. Plusieurs étudiants qui éprouvent des difficultés sont accompagnés pendant leur secondaire. L’idée est de les accompagner également au cégep.

Comment est né le projet ?

Le déclic a eu lieu à l’hiver 2013. Le fait d’être en contact avec certains étudiants qui n’étaient pas à leur place au cégep a fait naitre en moi une réflexion sur l’équité des chances et la responsabilité qui nous incombe à nous enseignants mais aussi à l’institution d’enseignement. Les difficultés rencontrées par ces étudiants au parcours cahoteux étaient en effet souvent associées à une trajectoire de vie qui présentait des contraintes majeures à leur réussite scolaire.

J’ai donc soumis un projet à la coordination du Département de littérature et de français, à l’hiver 2015. Le projet a fait son chemin jusqu’à la direction ; il a été accepté et c’est maintenant le moment du développement.

Je crois vraiment que les cégeps et les universités ont le devoir de partager leurs connaissances et leurs infrastructures avec la population, de redonner à la société. Il y a donc un ancrage naturel entre le cégep et des projets d’éducation populaire.

Quel est le plan d’action ?

L’objectif de l’année 2015-2016 est de faire des liens avec les organismes communautaires, élaborer un projet-pilote, voir quels cours pourraient être offerts en plus des cours de littérature (probablement des cours de sciences humaines, de philosophie, d’éducation physique et d’anglais), voir comment le projet pourrait fonctionner. Après, j’espère bien qu’on pourra mettre tout ça en place localement.

Diogène est un philosophe grec né à Sinope en 413 avant J.C. et mort en 327 avant J.C. Appartenant à l’École des cyniques, il considérait les richesses et les conventions sociales comme une entrave à la liberté humaine. Il logeait dans un tonneau (en fait une grosse jarre) et se promenait en plein jour avec une lanterne, car, disait-il, il «cherchait l’homme et ne trouvait que des hommes.»

Émilie Jobin